Médiation à la consommation : la blague !
mercredi 17 janvier 2018La médiation à la consommation a été rendue obligatoire par l’ordonnance n°2015-1033 du 20 août 2015 relative au règlement extrajudiciaire des litiges de consommation. Cette ordonnance donne la définition du médiateur à la consommation et de la médiation à la consommation. Si de légitimes espoirs avaient pu naître à cette époque, la mise en oeuvre concrète laisse pour le moins à désirer, ainsi que cette histoire le prouve.
Renégocier son prêt immobilier avec son avocat
Une cliente vient me consulter à propos d’un crédit immobilier qu’elle a de plus en plus de difficultés à rembourser du fait d’un accident de la vie. Elle a tenté à de nombreuses reprises de le renégocier avec la banque. Sans succès. C’est dans ce contexte qu’elle vient prendre le conseil d’un homme de l’art, histoire de savoir s’il ne serait pas possible de faire pression sur la banque pour trouver une solution.
Et il faut dire qu’à la vue du tableau d’amortissement, il y avait de quoi se poser quelques questions. Montant 105 000 €. TEG 5.698220 %. Durée 300 mois. Coût total de l’opération : 196 245 €, soit 91 245 € d’intérêts.
Quelques calculs plus tard, et après avoir analysé le contrat de prêt, il apparaît que certaines stipulations contractuelles sont susceptibles d’encourir la sanction, classique en la matière : la nullité de la stipulation de la clause d’intérêts conventionnels (prévoyant donc les 91 245 € d’intérêts).
Les tentatives amiables demeurent infructueuses et, naïf confiant en la médiation, je suggère à ma cliente que nous saisissions le médiateur des banques pour trouver une solution amiable.
Quel est le rôle du médiateur des banques ?
L’ordonnance n° 2015-1033 du 20 août 2015 relative au règlement extrajudiciaire des litiges de consommation dispose que la médiation des litiges de consommation est un processus de médiation conventionnelle, tel que défini à l’article 21 de la loi n° 95-125 du 8 février 1995 relative à l’organisation des juridictions et de la procédure civile, pénale et administrative ou un autre processus de médiation conventionnelle prévu par la loi. Le médiateur est tenu d’accomplir sa mission avec impartialité, compétence et diligence.
Le rôle du médiateur des banques est donc, en principe, d’accompagner les parties pour trouver une solution à leur litige.
La charte de la médiation bancaire précise d’ailleurs que « Aucun lien hiérarchique ou fonctionnel n’existe entre la banque et le médiateur, qui est clairement séparé des organes opérationnels de la banque et dispose d’un budget distinct et suffisant pour lui permettre de mener à bien sa mission.
L’utilité de la médiation à la consommation remise en cause
La question de l’utilité d’une telle étape procédurale reste à déterminer. En effet, dans le cadre du dossier de ma cliente impécunieuse, le médiateur à la consommation a été régulièrement saisi, et nous lui avons exposé de manière circonstanciée les points du litige.
La réponse du médiateur laisse… perplexe :
« Maître GRIS au nom de madame X…, fait valoir que le calcul du taux d’intérêt appliqué à l’occasion du crédit immobilier, consenti aux époux X… par la banque en novembre 2014 a été calculé, selon son étude, sur la base d’une année comportant 360 jours et non pas 365 jours. Il fait valoir que cette irrégularité entraîne la déchéance du taux d’intérêt conventionnel au profit du taux d’intérêt légal.
La banque fait observer que le calcul du taux de l’intérêt conventionnel appliqué au prêt immobilier en cause est établi sur la base d’une année civile, divisée en 12 périodes mensuelles conformément aux dispositions du Code de la consommation.
Proposition du médiateur
En l’état des informations portées à sa connaissance, dès lors que la confrontation des positions ne lui permet pas d’établir avec certitude le préjudice qui aurait été subi par madame X, le médiateur de la consommation ne formule aucune proposition à l’encontre de la banque«
La médiation à la consommation conditionnée à l’existence d’un préjudice
Le médiateur ne conclue donc pas au fait que la banque ait effectivement violé les dispositions du Code de la consommation, ce qui est objectivement le cas, mais conclu à l’absence de préjudice. Il ne propose aucune solution. Ce médiateur, sort donc de son rôle de médiateur, puisqu’il ne fait pas preuve de neutralité. La motivation de sa décision est scandaleuse, et prive d’intérêt ce recours, qui avait pourtant l’apparence de la qualité.
Nous allons donc saisir le juge des référés pour demander la désignation d’un expert judiciaire qui établira les fautes de la banque, et calculera le préjudice de ma cliente. Cette procédure sera coûteuse, mais sera mise à la charge de la partie perdante. Combien de consommateur se seront découragés avant ?
Plus que jamais, il est nécessaire de vous faire accompagner par un avocat lorsque vous envisagez une procédure de médiation à la consommation, et tout particulièrement lorsque l’enjeu du litige est important.